Recevabilité des demandes de condamnation du maître d’ouvrage et des autres participants dans une même instance

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Depuis la décision du Conseil d’Etat Région Haute Normandie du 5 juin 2013, dont il ressort très clairement que le maître d’ouvrage n’a pas à répondre des fautes commises par les autres participants à l’opération de construction, les divers intervenants sont nécessairement amenés à formuler des demandes les uns contre les autres sur un fondement quasi-délictuel (faute de lien contractuel).

Comme c’est souvent à l’occasion du litige portant sur le solde du marché que les comptes sont réglés, les entreprises de travaux et les maîtres d’œuvre ont donc commencé à demander, dans le cadre d’une instance unique, l’indemnisation des préjudices subis du fait du déroulement des opérations de travaux, à titre principal, à leur cocontractant, le maître de l’ouvrage, et, à titre principal ou subsidiaire, à ces tiers que sont les autres participants.

Or, certains juges du fond, comme, par exemple, ceux du Tribunal administratif de Nîmes, ont considéré que ces dernières conclusions soulevaient un litige distinct par rapport à celles tendant au règlement du marché lui-même. D’autres juges admettaient, au contraire, la recevabilité de telles conclusions.

C’est ce débat que le Conseil d’Etat vient trancher.

Dans cette affaire, qui concernait une opération de construction hospitalière ayant donné lieu à de multiples contentieux, la Cour administrative d’appel de Nancy avait estimé que les titulaires de marchés de travaux pouvaient uniquement, dans le cadre de l’instance en fixation du décompte du marché, formuler des appels en garantie contre les autres intervenants.

Le Conseil d’Etat considère que la Cour a, ainsi, commis une erreur de droit.

Il formule, à cette occasion, un considérant de principe sur la question, rédigé en ces termes :

« Considérant que, dans le cadre d’un contentieux tendant au règlement d’un marché relatif à des travaux publics, le titulaire du marché peut rechercher, outre la responsabilité contractuelle du maître d’ouvrage, la responsabilité quasi-délictuelle des autres participants à la même opération de construction avec lesquels il n’est lié par aucun contrat de droit privé ».

La Haute juridiction admet donc la recevabilité des conclusions dirigées contre les autres participants (dès lors que le requérant n’est pas lié par un contrat de droit privé avec ceux-ci), ce qui parait particulièrement opportun, dans la mesure où la multiplication d’instances, pour traiter de difficultés souvent profondément imbriquées, ne paraissait pas aller dans le sens de l’intérêt d’une bonne justice.

CE, 5 juillet 2017, société Eurovia Champagne-Ardenne et autres, req. n° 396430, T.Rec