Brèves de la catégorie : Autres marchés

L’acheteur n’est pas obligé d’inviter un soumissionnaire à régulariser son offre

Dans cette affaire, un candidat évincé se plaignait de ce que le pouvoir adjudicateur ne l’avait pas invité à régulariser son offre comme l’y autorise l’article 59 du décret n°2016-360 du 25 mars 2016.

C’est l’occasion, pour le Conseil d’Etat, de mentionner qu’il s’agit là d’une simple faculté, même si, lorsqu’elle est exercée, elle doit l’être à l’égard de tous les soumissionnaires concernés.

CE, 21 mars 2018, département des Bouches-du-Rhône, Req. n°415929

Le maître d’ouvrage n’a pas à rediriger un bordereau Dailly vers le comptable

Une banque avait notifié la cession d’une créance (bordereau Dailly) au titre d’un marché public, non pas au comptable public mais au maître d’ouvrage, en méconnaissance des dispositions de l’article R. 313-17 du code monétaire et financier et de l’article 108 du code des marchés publics.

Des sommes ayant été réglées par le comptable au cédant, la banque (cessionnaire) tentait de rechercher la responsabilité du maître d’ouvrage (cédé) pour ne pas avoir, en méconnaissance de l’article L. 114-2 du code des relations entre le public et l’administration (en vertu duquel l’autorité incompétemment saisie d’une demande la transmet à l’autorité compétente), transmis cette notification au comptable.

Le Conseil d’Etat, à l’instar de la cour administrative d’appel précédemment saisie, rejette la demande au motif que le code monétaire et financier institue un régime particulier de notification, et que cette notification ne tend pas à la prise d’une décision, mais constitue une information destinée à faire obstacle au règlement de la créance entre les mains du cédant. En conséquence, elle n’entre pas dans le champ d’application de la disposition susmentionnée du code des relations entre le public et l’administration.

CE, 9 mars 2018, CROUS de Nice-Toulon, Req. n°407842, T.Rec.

L’urgence en matière de reprise des relations contractuelles

A la suite d’une mesure de résiliation unilatérale, les titulaires du marché public résilié ont exercé un référé suspension (article L.521-2 du code de justice administrative) en vue que soient ordonnées la suspension de l’exécution de cette décision ainsi que la reprise des relations contractuelles (voir Conseil d’État, Sect., 21 mars 2011, n°304806).

Après avoir relevé que c’est à tort que le juge des référés avait considéré que la condition d’urgence était, « par principe », remplie du seul fait que la mesure de résiliation du marché ne reposait pas sur des manquements à leurs obligations contractuelles de la part des titulaires du marché, la Haute assemblée a décidé de régler l’affaire au fond (en application des dispositions l’article L.821-2 du code de justice administrative).

Le Conseil d’Etat a, ainsi, considéré que la circonstance que les titulaires du marché résilié aient invoqué, pour justifier l’urgence, une « perte de chiffre d’affaires égale à 25% » ainsi qu’une « atteinte à leur réputation », ne permet pas, en tant que tel, d’établir que la mesure de résiliation porterait une atteinte grave et immédiate à leurs intérêts dès lors que les requérants n’ont produit aucune pièce justificative en ce sens au soutien de leurs prétentions.

Par conséquent, la demande des requérants est rejetée.

Cette décision du Conseil d’Etat confirme une jurisprudence établie en la matière selon laquelle l’urgence ne se présume pas en principe et doit impérativement être démontrée par le requérant.

Conseil d’Etat, 7e ch., 18 décembre 2017, n°412066

Origine commune du dommage et litiges distincts

D’un côté, un prestataire de restauration collective demandait à l’Etat une indemnisation au titre des coûts de location des modules de cuisine qu’il avait dû exposer pour continuer à exécuter le marché dont il était titulaire à la suite de l’incendie d’une friteuse survenu dans le restaurant exploité, et d’un autre, l’Etat demandait la condamnation de l’opérateur qui lui avait fourni, en vertu d’un marché distinct, ladite friteuse.

Contrairement au tribunal saisi en première instance, la Cour administrative d’appel de Marseille avait rejeté les conclusions de l’Etat contre ce second opérateur comme irrecevables, au motif qu’elles relevaient d’un litige distinct.

Le Conseil d’Etat considère que ce faisant, la Cour n’a pas commis d’erreur de droit, quand bien même les deux actions ont pour origine le même incendie, provoqué par cette friteuse.

CE, 6 décembre 2017, Ministre de la défense, Req. n°406707

Compétence du juge administratif pour connaître de l’appel en garantie d’une personne publique fondé sur un contrat administratif

L’appel en garantie d’un centre hospitalier ayant été condamné en raison d’une prothèse défectueuse, à l’encontre du fabricant de cette prothèse, auquel il n’est pas lié par contrat (l’établissement n’étant lié par un marché public qu’à l’entreprise tierce qui avait fourni ladite prothèse) sur le fondement des dispositions des articles 1245 et suivants du code civil (anciennement articles 1386-1 et suivants de ce code), relève de la compétence des juges judiciaires.

A contrario, les juridictions administratives auraient été compétentes si le centre hospitalier avait été lié par un contrat administratif (étant rappelé que les marchés publics et les concessions sont administratifs par détermination de la loi) à ce fabricant (TC, 11 avril 2016, Centre hospitalier de Chambéry c/,et autres, n° 4044, p. 582).

CE, 15 novembre 2017, centre hospitalier de Lannion, Req. n°403317, T.Rec