Brèves de la catégorie : Autres marchés

L’irrecevabilité du référé précontractuel était imputable à la tardiveté de la saisine et non à la prématurité de la signature du marché

La Ville de Paris avait lancé une procédure concurrentielle avec négociation en vue de l’attribution d’un marché à bons de commande portant sur la fourniture de petits véhicules utilitaires. Ayant, le 4 novembre 2016, informé les candidats dont l’offre n’était pas retenue qu’un délai de 11 jours serait respecté avant la signature du contrat, elle a cru pouvoir signer le marché le 14 novembre 2016, soit un jour trop tôt.

Quand des candidats évincés ont saisi le juge des référés précontractuels le 18 novembre 2016, il était donc trop tard à tous points de vue : le contrat était signé et le délai de stand-still était expiré à cette date. Ils ont néanmoins tenté la voie du référé contractuel, prenant prétexte du caractère prématuré de la signature du marché pour soutenir qu’ils auraient été empêché d’introduire utilement un référé précontractuel.

Suivant les conclusions de son rapporteur public, le Conseil d’Etat a, contrairement au juge de première instance, fait échec à cette tentative : après avoir recherché l’origine de l’irrecevabilité du recours en référé précontractuel, la Haute juridiction considère que ce n’est pas le comportement de la Ville de Paris qui a privé les requérantes de la possibilité d’introduire utilement un tel recours, mais le fait d’avoir déposé celui-ci 3 jours après l’expiration du délai de suspension.

La requête en référé contractuel est donc rejetée.

CE, 24 mai 2017, ville de Paris, n°407047, T.Rec

Maitrise d’œuvre : le décompte général du marché peut être implicite

Le Conseil d’Etat vient de considérer que l’existence du décompte général et définitif d’un marché de maîtrise d’œuvre peut se déduire du paiement du solde du marché figurant dans le décompte final du titulaire, en l’absence d’éléments démontrant que, par ce paiement, le maître de l’ouvrage n’a pas, en réalité, procédé au règlement du solde, mais au règlement d’un simple acompte.

La formalisation d’une décision explicite n’est donc pas une condition nécessaire de fixation du montant – définitif – du solde du marché.

Concrètement, la demande du maître de l’ouvrage de voir le maître d’œuvre condamné au titre de pénalités de retard est rejetée du fait de ce caractère définitif du décompte.

CE, 17 mai 2017, cne de Reilhac et A, n°396241, TRec

Méconnaissance de l’obligation d’allotissement le précedent marché ayant été alloti géographiquement

Dans une décision du mois d’octobre, la Cour administrative de Douai en est venue à confirmer l’annulation d’un marché, ce qui constitue la sanction la plus grave qui puisse atteindre un tel contrat, en raison d’un vice d’une particulière gravité portant sur son objet.

Ce vice tient au recours à un marché global plutôt qu’à un marché alloti, alors qu’un précédent marché, qui avait le même objet, avait été alloti géographiquement. Le pouvoir adjudicateur avait bien tenté de faire valoir que le caractère global du marché lui avait permis de faire des économies d’échelle, mais la Cour a écarté cet argument, en se fondant notamment sur le fait que cette circonstance, résultant de la comparaison des prix des marchés antérieurement conclus et des nouveaux marchés, n’avait pu être prise en compte au moment où l’acheteur avait choisi de recourir à un marché global.

A noter : le décret n°2016-360 du 25 mars 2016 exige désormais que le recours à un marché global soit justifié par le pouvoir adjudicateur dans les documents de la consultation ou le rapport de présentation, dans le cadre d’une procédure formalisée, ou dans les documents relatifs à la procédure, qui doivent être conservés, dans le cadre d’un Marché à procédure adaptée (MAPA).

CAA Douai, 6 octobre 2016, Région Nord-Pas-de-Calais, Req. n° 14DA00714

Le pouvoir adjudicateur peut imposer que le mandataire d’un groupement de maîtrise d’œuvre soit un BET

Les candidats à un marché public sont libres d’y répondre individuellement ou en groupement. Leurs capacités s’apprécient, aux termes de l’ancien article 51 du code des marchés publics, repris à l’article 45 du décret n°2016-360 du 25 mars 2016, au niveau de « l’ensemble des membres du groupement ».

Dans cette affaire, la Cour administrative de Douai considère néanmoins que cette liberté peut être légitimement encadrée par le pouvoir adjudicateur, et qu’il peut notamment exiger que le mandataire soit un Bureau d’Etudes Techniques (BET), si cette exigence n’est pas manifestement disproportionnée au regard de l’objet des prestations confiées dans le cadre du marché.

Au cas d’espèce, aucune disproportion n’est relevée au regard de cet objet, qui portait sur « la conception des travaux de plantation et de pérennisation du patrimoine végétal du parc, (…) la mise en œuvre d’une réflexion sur le fonctionnement hydraulique des bassins dans une optique de gestion et de réduction de la consommation en eau, la recherche de perspectives de refonte de l’ensemble des circulations et réseaux, de même que l’étude de la rénovation de l’ensemble des mobiliers et de l’éclairage public », toutes prestations impliquant, compte tenu des domaines concernés, une approche globale.

CAA Douai, 6 octobre 2016, Req. n° 14DA02026

L’administration ne peut se prévaloir de ses propres irrégularités pour déclarer sans suite une procédure

Dans cette affaire, le pouvoir adjudicateur avait notifié aux candidats le rejet de leur offre avant d’avoir obtenu, de la part du candidat dont l’offre avait été retenue, les pièces mentionnées à l’article 46 du code des marchés publics. Or, ce dernier n’a pas produit ces pièces dans le délai fixé. Ayant considéré qu’il ne pouvait se tourner vers le candidat arrivé en deuxième position, du fait de la caducité de l’offre de ce candidat, provoquée par le courrier de rejet, le pouvoir adjudicateur a décidé de déclarer la procédure sans suite.

Le candidat arrivé en deuxième position a alors formé un recours indemnitaire contre le pouvoir adjudicateur, motivé par l’irrégularité de son éviction. Contrairement au Tribunal saisi en première instance, la Cour administrative d’appel fait droit à sa demande. Elle considère que le pouvoir adjudicateur ne pouvait se prévaloir de l’irrégularité commise de son fait pour déclarer sans suite la procédure, à défaut de motif d’intérêt général, et qu’il aurait dû solliciter la société requérante, dont l’offre ne présentait aucune non-conformité. Le pouvoir adjudicateur a donc entaché la procédure d’une irrégularité de nature à engager sa responsabilité.

CAA Nancy, 5 juillet 2016, société Hygie-Serv, Req. n° 15NC00330